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Le projet de partition de EDF : pourquoi ?

vendredi 11 juin 2021, par Patrick Cotrel - -

Le projet « Hercule » élaboré par EDF et le gouvernement répond en premier lieu à la situation financière catastrophique d’EDF. L’endettement de cette entreprise est au bas mot de 42 milliards €, qui s’explique pour une grande part par l’échec industriel et financier de l’EPR et les nombreux incidents dans les centrales nucléaires « classiques ».

Quel choix ?
De plus, quelque soit le choix stratégique effectué (réduire la part du nucléaire et miser sur les énergies renouvelables ou bien s’entêter dans un haut niveau de nucléaire), un haut niveau d’investissements est indispensable :
- La mise à niveau des vieilles centrales nucléaires (le ‘grand carénage’) est chiffré par la cour des comptes à 100 milliards €, sans parler du projet de construction de 6 centrales EPR (le coût de la centrale EPR de Flamanville est rendu à plus de 20 milliards €, et elle n’est toujours pas terminée…) ;
- Les filières de production d’énergie renouvelable (principalement éoliennes et photovoltaïque, puisque les barrages hydrauliques ne peuvent plu beaucoup progresser) demandent un investissement fort et rapide, pour rattraper le retard français en la matière. C’est d’autant plus pressé que les capitaux privés vont vite comprendre que ces filières de production d’électricité sont les plus rentables. Voir à ce sujet l’article « Investir dans les énergies de demain (déjà disponibles aujourd’hui) » publié sur ce blog : cliquer ici. C’est ce qu’a indiqué le PDG d’EDF, Jean-Bernard Lévy dans un entretien aux Echos (18 février) : « Nous sommes en train de prendre un retard majeur par rapport à nos grands concurrents ». « compte tenu de la baisse des prix du solaire et de l’éolien, (…) sans Hercule, EDF est un acteur qui n’a pas les moyens de se développer là où il y a de la croissance.  »

Quelle partition de EDF ? :
Le projet « Hercule » vise à créer deux entités distinctes :
- Une ‘EDF verte’, regroupant la production d’électricité à partir des énergies renouvelables (éolienne et solaire, principalement), l’activité de commercialisation et Enedis, la société chargée de toute la distribution de l’électricité (quelque soit le producteur ou l’entreprise de commercialisation). Et, bien entendu, le capital est (grand) ouvert aux capitaux privés, dans la limite de 30 %… dans un premier temps, puisque GDF a montré que cette limite ne tenait pas très longtemps : aujourd’hui l’État ne contrôle plus que 23 % du capital de Engie.
- Une ’EDF bleue’, rassemblant la production d’électricité par les centrales thermiques (charbon, gaz, nucléaire), ainsi que la gestion du réseau de transport de l’électricité RTE (gourmand en investissements de mise à niveau), qui seraient sous la responsabilité de l’État. Ainsi, l’État se retrouverait seul à financer les énormes pertes du nucléaire (‘grand carénage’, EPR de Flamanville et indemnités de retard pour les centrales EPR en Finlande et bientôt en Angleterre…), le démantèlement des centrales à énergies fossiles, ainsi que l’entretien du réseau de transport de l’électricité.

Mais pourquoi Enedis ne reste pas dans le giron de l’État ?
A partir du moment où la France a fait le (bon) choix d’avoir un seul réseau électrique, il est évident que son entretien et sa gestion font partie de l’intérêt général, et doit, à ce titre, rester sous la responsabilité de l’État. Bref, cette séparation entre RTE et Enedis n’a aucune logique.
Les revenus d’Enedis sont assurés par la taxe d’utilisation des réseaux publics de l’électricité, payée par tous les consommateurs, quelque soit leur fournisseur. Jusqu’à présent, cette filiale a surtout servi de pompe à finances à un groupe EDF assoiffé de liquidités pour faire ace à ses engagements dans le nucléaire.

Le choix est donc clair. Le gouvernement aurait pu de désengager progressivement du nucléaire pour s’engager dans les énergies renouvelables. Mais il préfère faire le sacrifice de Enedis pour attirer les capitaux privés qui ont ainsi une assurance tous risques. Et c’est l’État qui va payer la facture des énormes pertes du nucléaire, de la sortie des énergies fossiles et des investissements dans le réseau électrique.
Les bénéfices au privé et les pertes à l’État ; telle est la philosophie du « libéralisme à la française  » !
Reste encore une inconnue : dans quelle corbeille vont tomber les barrages hydro-électriques qui produisent 13 % de la production nationale d’électricité. Ces barrages sont la propriété de l’État qui en a délégué la gestion à EDF. Les syndicats sont mobilisés et les négociation avec l’Europe sont en cours...

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