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Déméter, la cellule de la gendarmerie qui surveille les opposants à l’agriculture productiviste

lundi 2 mars 2020, par Patrick Cotrel

Pour lire plus de détails, vous pouvez consulter le dossier de Reporterre sur ce sujet, en cliquant ici.

Une nouvelle cellule de renseignement de la gendarmerie :
Le 13 décembre 2019, dans le Finistère, le ministre de l’intérieur a présenté la création de la toute nouvelle cellule de la Gendarmerie nationale dédiée à la « protection » des agriculteurs, et nommée d’après la déesse grecque des moissons, Déméter. À ses côtés se trouvait le directeur général de la Gendarmerie nationale, mais également Christiane Lambert, présidente du syndicat agricole majoritaire, la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA).
Le dossier de presse de présentation de Déméter (Pour le lire, cliquer ici) donne le ton : « De plus en plus, nos agriculteurs sont visés par des intimidations, des dégradations, des insultes (…). Ces phénomènes, nous devons les prendre très au sérieux », y déclare le ministre en introduction. La cellule Déméter doit ainsi « assurer la sécurité des agriculteurs ». Pour cela, elle va les aider à sécuriser leurs exploitations, mais aussi centraliser au niveau national toutes les informations concernant les « atteintes au monde agricole », depuis les vols « crapuleux » jusqu’aux actes «  idéologiques », comme les intrusions de militants animalistes dans les élevages. Cette activité de renseignement doit notamment permettre d’empêcher les actions de ces groupes, qualifiés d’ « extrémistes  ».
Pour collecter ces informations, la gendarmerie s’appuie sur une initiative du ministère de l’agriculture : des observatoires de l’agribashing en création dans chaque département. La FNSEA et sa branche Jeunes Agriculteurs ont un rôle actif, puisqu’une convention signée avec le ministère de l’Intérieur ce 13 décembre acte qu’ils remonteront l’information à la gendarmerie, qui en retour avertira les agriculteurs en cas de menace. (…)
Le dossier de presse est clair, les cibles sont donc aussi d’ordre politique : Déméter suivra et tentera d’empêcher les « actions de nature idéologique, qu’il s’agisse de simples actions symboliques de dénigrement du milieu agricole ou d’actions dures ayant des répercussions matérielles ou physique ». « J’ai demandé que l’antispécisme soit un des axes prioritaires du renseignement », déclarait le ministre de l’Intérieur lors du lancement de la cellule. Les animalistes sont donc en première ligne, mais en filigrane, les associations et militants critiques du système agricole dominant (défendu par la FNSEA ) sont aussi concernés.
Fabrice Nicolino, promoteur du mouvement des Coquelicots, ne s’y est pas trompé : nous sommes dans le collimateur de Demeter !

Un ancien dispositif recyclé, mais avec des nouveautés !
Certaines dispositions de Déméter ressemblent fortement à un plan d’action contre les vols dans les exploitations agricoles datant de 2014. Les volets départementaux de ce plan avaient pour axes la prévention, la protection des installations agricoles et l’intervention des forces de l’ordre, et étaient développés sous forme de conventions tripartites entre les chambres d’agriculture, les préfectures et les gendarmeries. Ces conventions mettaient en œuvre un réseau d’alerte par SMS appelé Vigi Agri, permettant d’informer les agriculteurs en cas d’intrusion chez l’un d’eux. De même, il était question dès 2014 de développer des moyens d’enquête spécialisés face aux « structures criminelles organisées », afin de renforcer la judiciarisation des atteintes touchant les agriculteurs, principalement des vols.
Mais la nouveauté, c’est que le contrat est signé, non plus avec les représentants officiels du monde agricole (les chambre d’agriculture), mais avec un seul syndicat, la FNSEA ! De plus ce plan fait allègrement l’amalgame entre les actions de malfaiteurs (vols de matériel et de bétail) et des actions politiques de dénonciation de maltraitance animale et d’utilisation de pesticides chimiques dans les cultures.
En amalgamant tous les méfaits recensés, le ministère de l’Intérieur conclut gravement à une hausse de 1,5 % des atteintes au monde agricole en 2019. Mais sur les plus de 14.000 faits enregistrés, l’immense majorité sont des vols et cambriolages. Questionnée par Reporterre, la Gendarmerie nationale nous apprend que seulement une vingtaine de cas d’intrusions dans des élevages ou libérations d’animaux par des militants antispécistes ont été comptés parmi les infractions l’an dernier.

Une situation de plus en plus tendue...
La FDSEA et les JA de Haute-Garonne ont lancé œufs, poubelles, paille et insultes, devant les locaux toulousains de France nature environnement Midi-Pyrénées le 13 février au soir ; le lendemain, c’était dans les Côtes-d’Armor que la FDSEA tentait d’empêcher une conférence sur les effets écologiques de la méthanisation à grande échelle. Mais dans ces deux cas, la gendarmerie n’a pas bougé : cela ne semble pas rentrer dans le domaine d’action de Demeter !
Ces actions ont, bien entendu, dénoncées par les associations environnementalistes. Voir l’article de Reporterre en cliquant ici.
De plus, le 27 février, 27 organisations — dont France nature environnement, la Fondation Nicolas Hulot, la Ligue des Droits de l’Homme ou le WWF — ont demandé, dans une lettre ouverte au Premier ministre Édouard Philippe, la dissolution de la cellule Déméter. Pour lire l’article de Reporterre, cliquer ici.
Et, pour compléter le tableau, l’association L214 a dénoncé les conditions effroyables de mise à mort des veaux à l’abattoir Sobeval en Dordogne, images à l’appui. Des échanges de mails internes au ministère de l’agriculture accréditent la véracité des faits dénoncés. Mais le ministre de l’agriculture Didier Guillaume nie les faits et parle du "respect du bien-être animal" dans cet abattoir ! Il arrache même le micro à une journaliste venue le questionner sur cette affaire lors d’une conférence de presse.
L214 a lancé une pétition pour demander la démission du ministre de l’agriculture. Pour en prendre connaissance (et la signer), cliquer ici.
Dernière nouvelle : Didier Guillaume reconnaît la véracité des faits et ordonne la suspension de l’abattoir.

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