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« Accueillir une partie de la misère du monde »

mardi 6 février 2018, par Patrick Cotrel - - -

Dans son édition de lundi 2 février, Ouest-France rendait compte de la démarche en direction du Maire de certains habitants de la rue de la Rongère à Sainte-Luce, pour se plaindre de l’occupation d’un terrain voisin par des camps de Roms.
Philippe Barbo, président de Soleil rom (Sainte-Luce), membre du collectif Romeurope de l’agglomération nantaise, réagit sur cette situation. Ce texte a été publié dans l’édition du mardi 6 février de Ouest-France (Nantes forum).

"Président de l’association Soleil rom, qui accompagne depuis 2009 la dizaine de familles roumaines installées sur le terrain municipal (et donc légal) du 86, rue de la Loire, à Sainte-Luce-sur-Loire, je ne peux rester indifférent à la situation des riverains du quartier de la Minais, décrite dans l’article d’Ouest-France de ce lundi 5 février. Si l’on peut contester la circulation d’armes, le voisinage et l’état des deux bidonvilles dans ce quartier posent évidemment problème en matière de sécurité, d’hygiène et de tranquillité publique.
Mais que faut-il faire ? Sainte-Luce, comme toutes les autres communes qui voient s’installer illégalement des bidonvilles, est victime de quelque dix années de la politique nationale et locale qui a prôné "la fermeté et l’humanité", sans s’en être donné les moyens humains et matériels.
Depuis 2007, le collectif Romeurope de l’agglo nantaise dénonce cette politique de la patate chaude et quelques trop rares communes, comme Sainte-Luce, la première, en 2009, puis Indre, Vigneux et Treillières, en 2010, ont joué la carte de la solidarité intercommunale et du courage politique.
Qu’ont fait les autres grosses communes ? Rien, pas grand-chose, sinon favoriser le pourrissement de cette question de l’accueil des migrants roumains.
Quand, comme à Sainte-Luce, une mairie et une association se donnent les moyens pour accueillir une partie de la misère du monde (comme disait l’autre l), il n’y a pas de délinquance sur le terrain, les enfants vont tous à l’école, la médiation sanitaire est assurée, les adultes travaillent régulièrement et l’habitat en logement ordinaire devient envisageable. Sachez que sur le terrain du 86, plusieurs familles ne bénéficient pas de la CMU complémentaire, pour dépassement du plafond de ressources !
« Les enfants vont tous à l’école »
Sur les camps illégaux, on en est bien loin : l’absence de perspectives, la peur de l’expulsion et la précarité sociale et financière n’engendrent que combines, dérives et non-droit. C’est inadmissible, intolérable, oui, mais c’est ainsi !
Alors, soulignons la démarche de Rezé et le tout nouveau projet de la Mous (Maîtrise d’œuvre urbaine et sociale), portée par Nantes métropole et l’État, qui sont une réponse (partielle) à cette question des migrants roumains.
Donnons surtout aux associations locales les moyens d’intervenir pour favoriser la cohésion et le lien social, facteurs de lutte contre la crispation, la stigmatisation, la discrimination et le repli sur soi.
Avec quelques adhérents d’une autre association (Roata), j’interviens également dans un bidonville (un camp illégal, quoi !) du Vieux-Doulon, auprès d’une dizaine de familles roumaines. Dès lors qu’elles sont accompagnées et reconnues socialement, ces familles commencent à entrer dans un processus d’inclusion, certes lent et fastidieux : les hommes travaillent tous en intérim ou en CDD et délaissent progressivement le ferraillage, les femmes suivent des cours de français, quelques enfants vont à l’école, il n’y a pas de problèmes de voisinage.
Mais il faut du temps ! Et beaucoup de courage ! Et un peu d’humanité !
Et quelques moyens matériels et financiers dérisoires, comparés au coût réel de la politique de la gestion des bidonvilles : démantèlement et remise en état des terrains, frais de justice, conséquences de la rupture des soins de santé, scolarisation perturbée, pour aucune autre perspective que de se réinstaller sur un autre terrain illégal. Et la roue (roata, en roumain) continue de tourner !
"

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